12-10-2021--Calque-SmartSlider2

Interview de Muriel Blanchon cheffe de projet

11/03/2022

Par Bertrand Viala, responsable stratégie et développement chez ANEOL.

La riche semaine qui s’achève, a été l’occasion, au milieu d’une actualité brûlante et souvent tragique, de célébrer le 8 mars dernier, la journée des droits de la femme. Cela a été l’occasion de faire le point avec Muriel Blanchon, cheffe de projet chez ANEOL, sur la place des femmes dans le secteur informatique, le métier de cheffe de projet, et les enjeux auxquels les femmes font face dans la tech en 2022.

Bertrand Viala : Muriel, bonjour tu es cheffe de projet chez ANEOL. Peux-tu nous rappeler en quoi consiste ton rôle et depuis combien de temps tu es à ces fonctions ?

Muriel : Je suis effectivement cheffe de projet depuis 2 ans, mais en poste chez ANEOL depuis 8 ans. Mais j’assume en fait un certain nombre de fonctions très variées. Mon rôle est polyvalent puisque nous sommes une petite société, donc je fais à la fois la gestion de projets de suivi et d’échanges avec les clients, mais également du webdesign, des formations. Mon rôle est de suivre les projets du début à la fin intégrant même parfois de l’avant-vente. Je dégage de la ressource pour le lancement d’autres initiatives lorsque ma présence est bien évidemment requise et pertinente.

Bertrand : Tu as vraiment un rôle très transverse sur l’ensemble de l’activité numérique d’ANEOL ?

Muriel : Oui, je travaille avec pratiquement tout le monde, toute l’équipe sur différents sujets, puisque nous sommes répartis sur certains groupes de travail avec les personnes et pas uniquement par service. Mon rôle est assez décloisonné par rapport aux équipes.

Bertrand : Quelle formations as-tu suivi pour atteindre ces responsabilités ? As-tu suivi un parcours ? Comment tu t’es formée sur ces métiers ? Peux-tu partager avec nous ton histoire ?

Muriel : Il y a 8 ans, j’ai fait une reconversion. Je n’étais pas du tout dans la tech, j’étais dans le tourisme, mais je gérais déjà un système d’information là où je travaillais et j’ai été très motivée et intéressée par la partie technique. Après mûre réflexion sur mon évolution, j’ai fait une reconversion et me suis inscrite à une formation d Infographiste en multimédia. Mon idée d’origine était surtout de travailler du côté webdesign. Mais, pour être franche, j’avais déjà dans l’idée de gérer des projets, mais j’ai voulu commencer par la base pour comprendre le métier et pouvoir évoluer. Le fait d’avoir travaillé dans le tourisme et d’avoir ce bagage d’un infographiste en multimédia m’a permis de trouver tout de suite un poste intéressant. ANEOL m’a proposé très vite d’intégrer les équipes. J’ai commencé par un stage, puis par une offre d’emploi. En effet, j’avais un réseau aussi dans le monde du tourisme mais, grâce à ma reconversion, je comprenais maintenant le métier plutôt du côté tech. J’ai, eu la chance de pouvoir vraiment y développer de nouvelles compétences et d’apprendre beaucoup sur le côté technique, de façon progressive. Cela a constitué une étape essentielle dans mon parcours.

Bertrand : Peux-tu nous nous parler d’ANEOL en tant qu’entreprise : quel est son parcours ? ANEOL est société qui travaille sur des projets à impact positif. Quelle définition donnes-tu de ce concept là et comment ça se traduit pour les clients de la société ?

Muriel : En huit ans, j’ai vu toute l’évolution d’ANEOL, et sa montée en puissance auprès d’acteurs divers gérant des projets d’utilité publique. Depuis le début, ANEOL a toujours travaillé avec le monde associatif, avec des fondations. C’est un choix, chez ANEOL nous portons tous en nous des valeurs qui sont liées à ce monde-là. Moi-même, je travaillais avant pour une association. Toute l’équipe partage, en fait, les valeurs liées à l’associatif et une certaine vision de la solidarité et de la bienveillance. C’est pour ça que je pense qu’ANEOL accompagne efficacement, justement, les associations, parce que nous les comprenons, respectons leurs engagements et partageons leurs valeurs.

Bertrand : comment définis-tu un impact positif et comment ANEOL arrive à mettre en application cette idée ?

Muriel : L’impact positif, c’est trouver des solutions à un problème que peuvent rencontrer nos clients et qui vont permettre d’améliorer le service qu’ils proposent ou la vie et la gouvernance de leur entité. Donc, l’objectif n’est pas de proposer une solution technique tout de suite, mais bien de discuter avec eux pour comprendre quel est leur problème et quelle est la meilleure solution qui pourra les impacter positivement dans le changement. Nous sommes vraiment dans l’accompagnement au changement dans les services numériques. Mais l’outil n’est qu’un moyen d’atteindre l’objectif. Nous sommes vraiment à l’écoute de nos clients, dans toutes les dimensions de leur engagement. Nous pouvons les comprendre et travailler avec eux à l’outil qui va les faire évoluer. Ils ont tous un rôle à jouer dans ce changement et ils doivent être impliqués dans tout notre travail.

Bertrand : Il s’agit en fait d’une logique de transformation numérique, de tactique digitale. Peux-tu en donner une définition et expliquer ce qui distingue la tactique de la transformation digitale ?

Muriel : La tactique digitale, c’est vraiment un plan de bataille, qu’on va mettre en place : on va définir avec notre client quel est le meilleur moyen d’atteindre son objectif. C’est un terme un peu guerrier, la tactique, mais c’est vraiment l’idée. Nous-mêmes nous n’allons pas mener une bataille, qui reste le privilège de nos clients mais nous allons déterminer la meilleure tactique pour atteindre les objectifs que le client s’est fixé. Ce n’est pas vraiment de la transformation digitale parce que nous avons toujours l’humain au cœur du projet ici. Si les personnes ne sont pas prêtes à aller vers ce changement, nous aurons tout perdu. Tu peux amener autant d’outils que tu veux, ce ne sera pas gagné tant que tu n’auras pas l’adhésion des personnes. Donc, la tactique, c’est vraiment mêler à la fois les outils et les personnes.

Bertrand : Dans ton quotidien comment travailles-tu en équipe ?

Muriel : ANEOL a deux services de production : tout d’abord, le développement ; et d’un autre côté la partie administration système et réseaux. Mais plus les projets avancent, plus nous avons tendance en fait à gommer un peu cette division. Nous nous sommes rendu compte que dans l’élaboration de la tactique, il est important que toutes les compétences soient réunies provenant de ces deux services. Donc on fait vraiment appel à chaque personne en fonction de sa compétence et de son temps aussi disponible pour travailler sur les projets.

Bertrand : Il y plusieurs métiers représentés chez ANEOL. Peux-tu nous en parler et notamment au travers de projets que toi tu cogères puisque tu es au centre de toute l’activité ?

Muriel : En production, nous avons des profils qui sont plutôt sur du développement qui vont à la fois être spécialisés soit dans le développement de sites Internet, soit dans le développement d’applications métiers. Nous avons également des personnes, comme je disais sur la partie administration, système et réseaux, donc gestion de l’infrastructure, d’infrastructure, d’hébergement, de sécurité qui sont vraiment spécialisées aussi sur dans leur domaine. Et puis après, nous avons des personnes qui vont être plutôt transverses sur plutôt les fonctions supports d’ANEOL.

Nous avons une responsable en charge de l’administratif qui va gérer aussi toute la partie des commandes de matériel, ainsi qu’une partie de propositions de matériel auprès de nos clients. Si la tactique mise en place l’exige, comme sur des projets très spécifiques, notamment Pralin, qui est un produit qui a été développé par ANEOL qui est vraiment un peu à part de l’activité, nous avons une responsable qui coordonne et fait appel au reste de l’équipe en cas de besoins de développement, webdesign, en formation, etc.

Nous avons aussi un pôle formation qui reprend une partie des équipes évoquées plus haut. Au passage, il faut mentionner que nous sommes certifiés QUALIOPI. En effet, nous veillons à mettre en place beaucoup de démarches de qualité dans les formations. Elles interviennent souvent comme conclusion au travail de tactique dans une phase d’accompagnement au changement. C’est un parcours client très cohérent. Nous avons également des personnes dans le développement de l’entreprise. Toi, Bertrand, sur le développement et aussi sur la communication et Stéphane Taravant, un de deux cofondateurs et dirigeants, sur la partie commerciale.

Bertrand : Justement, pour rebondir sur une des grandes réalisations d’ANEOL peux nous dire deux mots sur le système PRALIN : En quoi consiste ce logiciel ? À qui s’adresse-t-il ?

Muriel : Pralin est un projet qui a démarré il y a deux ans, au début du confinement du premier confinement. Nous avons travaillé avec l’équipe de développement et intégré les modes de fonctionnement des acteurs de la gestion de crise. En effet, nous avions eu un échange avec l’ancien directeur de cabinet du département de la Loire, monsieur Thierry Pépinot, sur les besoins des communes pour renforcer leur capacité gérer des crises. II n’y avait en fait pas d’outils adaptés, tout se faisait à la main, etc. Donc nous, nos équipes ont creusé et élaboré un logiciel créé de toutes pièces sur les bases de plan communal de sauvegarde, etc. C’est vraiment du fait maison, mais avec l’appui et la connaissance de partenaires. Nous sommes très fiers de cette réalisation.

Nous avons ensuite mis en place une opération de ville pilote pour s’appuyer sur des communes et prendre en compte leur expertise dans la gestion de crise et les accompagner. Le package final comprend un logiciel, des formations et un accompagnement personnalisé pour les communes justement pour leur permettre d’adapter l’outil à leurs usages. Evidemment, ce n’est pas le plan ORSEC. Mais PRALIN aide vraiment à gérer des crises à certains niveaux dans les communes pour leur faciliter les démarches, gérer un annuaire de contacts, prévenir des gens. Nous sommes vraiment sur du terrain, de la gestion de crise de façon résolument opérationnelle.

Bertrand : Cette approche collaborative avec des clients ou partenaires potentiels, est quelque chose d’assez classique chez ANEOL, ou bien est-ce que PRALIN est un exemple unique de développement ?

Muriel : C’est un mode de fonctionnement assez normal. On peut considérer que c’est de l’avant-vente, mais en fait, ce n’est pas vraiment le cas. Nous sommes avec d’autres clients, plutôt en accompagnement avant que des projets sortent pour voir quelles sont les implications techniques qui peuvent survenir, et sur lesquelles on va aller creuser la pour informer le client et l’aider à construire son projet.

Bertrand : Alors, parle nous un petit peu des clients d’ANEOL actuellement. Tu as mentionné le monde associatif, les fondations. Peux-tu nous faire un tour d’horizon des types de clients qui sont accompagnés, des problématiques qu’ils gèrent ?

Muriel : Oui, bien sûr. Alors donc, ce que je disais tout à l’heure, nous avons la partie associative, l’Economie sociale et solidaire aussi, où là, nous sommes vraiment en accompagnement tactique avec des prestations d’administration, systèmes et réseaux, d’outils métiers dans lesquels on leur apporte des outils pour piloter leur activité. Nous travaillons également avec le milieu du tourisme, qui est aussi un secteur historique d’ANEOL. Donc là, avec le milieu du tourisme, nous sommes sur de la communication, donc des sites web. Nous avons quelques clients industriels aussi, avec qui nous travaillons plutôt sur l’organisation de leur parc informatique et de leur système de sécurité informatique. C’est vraiment de la tactique par rapport à l’administration systèmes et réseaux.

Bertrand : Quels sont les types de problèmes qui sont gérés selon les types de secteur ? Quand on parle de l’ESS (économie sociale et solidaire), il y a effectivement différentes problématiques spécifiques qui y sont associées, y compris dans la santé et l’environnement. Y a-t-il des sujets spécifiques auxquels ANEOL s’est attaché historiquement ?

Muriel : Chez ANEOL, concernant l’économie sociale et solidaire, nous considérons à la fois l’organisation des équipes des acteurs de ce secteur, donc de la conduite de changement, à laquelle nous associons bien sûr les démarches du numérique. Nous connaissons les produits destinés à l’économie sociale et solidaire et à l’associatif qui leur permettent d’être le plus productifs et efficaces en rapport avec les contraintes budgétaires et managériales spécifiques. Également, nous leur permettons de bénéficier des meilleures offres et conditions d’utilisation. Nous avons un vrai centre de ressources techniques et un réseau de partenaires par lesquels nous pouvons obtenir des licences prestigieuses à prix adapté. Nous sommes également partenaire Microsoft. Nous avons une connaissance d’enjeux sociaux spécifiques, comme ceux qui sont liés plutôt au milieu du handicap. Cela nous permet d’avoir une connaissance opérationnelle de la gestion de ces sujets, du fait de notre historique et de notre parcours, des outils qu’ils peuvent utiliser, qui leur permet de travailler en toute accessibilité, etc. Notamment sur les sites web, etc.

Bertrand : La connaissance des sujets sociaux importants est essentielle. Permets-moi de rebondir du coup sur un autre sujet social d’importance puisque cette semaine, nous avons célébré la Journée des droits de la femme le 8 mars. C’est une actualité qui est, hélas, permanente et assez cruelle dans tous les domaines. Regardons les chiffres : d’après le rapport DESI 2020, seuls 18% des spécialistes des TIC en Europe sont des femmes. Et paradoxalement, concernant la France : 57% de l’ensemble des diplômés en études supérieures sont des femmes, ce qui est très bien. Mais parmi elles, il y en a seulement 25% diplômées dans le numérique et parmi elles-mêmes, il n’y a que 13% qui travaillent dans le secteur. Alors, selon toi, comment interpréter ces chiffres ? Et quelle est ta vision ? Ton expérience de la profession, enfin du rôle des femmes dans cette profession ? Est-ce que ça rejoint les chiffres officiels ? Ou as-tu une vision différente au niveau de ton quotidien ?

Muriel : Non, je pense que c’est la réalité. En fait, ce sont des métiers très techniques. Les femmes ont du mal déjà à s’engager dans les études parce qu’on ne les pousse pas dès le départ dans ce type de cursus d’études en leur disant qu’elles peuvent le faire. Je pense que c’est vraiment à tous les niveaux. Donc moi, je pense que ça commence dès l’école. On considère que les filles n’ont pas la compétence de l’aspect technique et ensuite, je pense que dans les écoles, avec un milieu très masculin, c’est difficile pour elles de sortir leur épingle du jeu. Au moment des recrutements, je pense aussi que nous faisons encore face à un milieu très patriarcal. Lors des embauches, les recruteurs feront plus confiance sur la partie technique à un homme qu’à une femme. C’est mon ressenti : pour un poste de développeur à CV équivalent, le recruteur aura tendance malheureusement à se positionner plus favorablement vers le collègue masculin.

Bertrand : Il y a encore, selon toi, un très gros travail à faire dans le domaine du numérique vis à vis de la perception des genres associés au métier.

Muriel : C’est ça. On n’est pas encore dans l’égalité et la parité, c’est clair.

Bertrand : C’est encore très genrés en somme ?

Muriel : J’ai fait pas mal de réunions où il y avait des développeurs et le nombre de développeurs femmes dans la salle était très minoritaire : souvent dans une salle de 50 personnes, on était à une ou deux filles maximums, des développeurs j’entends. Sur les métiers de la technique c’est flagrant et en administration systèmes et réseaux, c’est encore pire. Dans ces formations, il n’y a pratiquement pas de filles, voire aucune.

Bertrand : C’est un constat qui est un peu pessimiste, mais en tout cas, assez réaliste sur l’état des choses et qui rejoint effectivement les statistiques officielles. Constates-tu cependant une évolution parmi peut être les jeunes filles que tu rencontres dans ton travail ou peut être simplement les acteurs publics et privés qui t’en parlent ? Est ce qu’il y a un changement, selon toi, des perceptions et potentiellement des orientations ?

Muriel : Cela change difficilement. Maintenant, il y a des actions menées par certaines associations pour présenter les métiers du numérique et essayer de motiver les filles qui en sont au niveau bac. Cela leur permet de découvrir ce qu’elles pourraient faire sur ces formations.

Bertrand : Quelles recommandations donnerais-tu aux jeunes femmes qui sont intéressées par une carrière dans la tech et les métiers du numérique ?

Muriel : Renseignez-vous les filles !! Le métier est ouvert. Et lancez-vous !! Si les métiers de la tech les intéressent, il faut y aller. Il n’y a pas de raison de laisser sa place à un mec.

Bertrand : Ha ha ! En fait, ce que t’es en train de dire aux jeunes filles et aux jeunes femmes c’est : ne vous laissez pas intimider par la perception des genres et vous allez pouvoir vous imposer parce que vous allez être techniquement tout à fait aussi excellente que les garçons !

Muriel : C’est ça. C’est que pour moi, la partie technique, il n’y a pas de différence entre un homme et une femme. C’est une question juste d’être bon et peu importe le genre.

Bertrand : J’imagine que ça ne tombera pas dans l’oreille de sourds et de sourdes. As un mot de la fin inspirant pour les gens qui liront cette interview ?

Muriel : J’espère qu’ils et elles chercheront à en savoir plus sur ANEOL pour comprendre ce qu’on fait et qui nous sommes. Et pourquoi pas, qu’ils et elles nous rejoindront pour une nouvelle aventure de femme développeur web, pour féminiser un peu plus l’équipe technique ?

Bertrand : Alors à bon entendrices, je me permets ce néologisme au regard du contexte, et entendeurs, salut. Voilà, vous serez les bienvenu.e.s. pour rejoindre l’équipe. Merci à toi, Muriel.

Muriel : Merci Bertrand

Aller au contenu principal